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Conversion et consolation

Conversion et consolation

Une nouvelle fois en plein du mois de décembre, dans la très feutrée Église Saint-Sulpice, pénètre un original ressemblant davantage à l’homme de Cro-Magnon de la chanson de mon enfance, au menu décidément très tendance écolo-bobo : sauterelles et miel sauvage. J’ai désigné le prophète Jean-Baptiste. Son accoutrement original est-il seulement un effet marketing, une technique pour attirer l’attention, ou bien autre chose ?

En réalité Jean-Baptiste est un prophète, c’est-à-dire celui chargé par Dieu de porter au monde une parole forte, une parole qui invite au changement, une parole qui invite à préparer la venue du Sauveur dans le monde. 

Et j’aimerais m’arrêter avec vous sur un aspect particulier de la prédication prophétique, non pas sur l’original en peau de bison, mais sur la parole d’Isaïe qui prêche la consolation à un peuple un peu désespéré par la déportation.

Apporter au monde la consolation 

Et nous sommes un peu dans la même situation. Ouvrez quelques minutes BFM et vous verrez si le monde n’a pas besoin de consolation. Entre Covid et crise économique à venir, les perspectives ne sont pas très réjouissantes, et la ruée marchande du Black Friday de vendredi dernier n’a guère redonné le moral à nos concitoyens. Je voyais l’autre jour sur Facebook un petit dessin humoristique qui disait en substance : « si j’avais su ce que serait 2020… je n’aurais pas passé le 31 décembre 2019 de la même manière à fêter l’arrivée de la nouvelle année ». 

À notre manière, ayant été privés de célébrations publiques pendant de longues semaines cette année, meurtris peut-être dans nos familles par la maladie, fatigués du télétravail et des apéros Zoom, nous voici un peu dans la situation du peuple d’Israël. Et c’est pour nous que Dieu parle aujourd’hui : « Consolez, consolez mon peuple ». « Comme un berger, il fait paître son troupeau : son bras rassemble les agneaux, il les porte sur son cœur, il mène les brebis qui allaitent ».

Le peuple de Dieu, sa création c’est le monde. Et la vocation du chrétien c’est d’apporter l’espérance au monde qui en a bien besoin. Alors que le décompte des morts de la Covid à travers le monde continue sa mortelle litanie quotidienne, qui osera annoncer un sauveur, une délivrance, une espérance ? Qui osera dire au monde qu’il est sauvé ? « Voici votre Dieu, voici le Seigneur Dieu, Il vient avec puissance » ? Non pas annoncer une conformité sociale ou une morale, mais un salut !

Notre monde attend la consolation : elle ne viendra pas des médias, elle ne viendra pas de l’argent, elle ne viendra pas du gouvernement ou des lois, car tout cela ne rassasie pas l’âme. Elle viendra du Seigneur qui a fait le Ciel et la terre. Pour cela, chers amis, il nous faut, comme les antennes 4G être sur la montagne, et l’annoncer au monde. Non pas rester confinés bien au chaud dans nos chapelles… mais le crier au monde.

La confession expérience de la consolation

Mais peut-être y a-t-il une petite étape auparavant. Elle est résumée par la prière d’ouverture de la messe de ce matin : « Ne laisse pas le souci de nos tâches présentes entraver notre marche à la rencontre de ton fils »… Le souci de nos tâches présentes… le souci qui alourdit notre marche, qui nous empêche de nous envoler vers le ciel… le souci et le péché. 

Car l’air de rien, notre brave original bobo-écolo au fond de son désert invite à « un baptême de conversion pour le pardon des péchés ». Et ceux qui venaient le rencontrer ne prenaient pas le thé avec de joyeux macarons de Pierre Hermé achetés rue Bonaparte, mais confessaient publiquement leurs péchés, comme nous le rapporte Saint Marc. 

En réalité, c’est peut-être cela la véritable expérience de la consolation : goûter à l’abondance de la Miséricorde par la confession, par la conversion.

Lorsque l’on parle de conversion, de changer de vie, les paroissiens se disent “allez, ça y est, on est parti pour le refrain du carême… plus besoin d’écouter”. Car on voit la conversion comme quelque chose de triste et de pénible. On image des efforts terrifiants comme dans le film Da Vinci Code où le « pseudo-moine » se flagelle le dos. Et pourtant, les lectures de ce jour qui nous parlent bel et bien de conversion nous invitent à une conversion joyeuse : « Consolez, consolez mon peuple, dit votre Dieu », « Car ce que nous attendons, selon la promesse du Seigneur, c’est un ciel nouveau et une terre nouvelle », « Il vient avec puissance ; son bras est victorieux ». Il me semble que la vraie conversion, frères et sœurs bien aimés, est un chemin de joie. Lorsque je confesse, je suis émerveillé par la joie profonde qui habite le pénitent quand il entend les paroles de l’absolution : « Que Dieu notre Père vous montre sa miséricorde ». Car celui qui vient se confesser vient précisément pour changer de vie. Nous avons tous dans notre vie des choses qui nous appesantissent, des traits de caractères, des habitudes mauvaises, des péchés récurrents qui nous minent petit à petit. Le temps est venu, frères et sœurs bien aimés, de vraiment préparer notre cœur à la venue du Seigneur.

La consolation est à annoncer au monde, à goûter dans la confession mais je crois qu’elle est aussi à vivre dans la communauté.

La communauté paroissiale, lieu de la consolation 

Je crois qu’il serait un peu facile pour nous de vivre la consolation de manière individuelle dans la confession, et de manière publique par l’annonce de l’Évangile… Il manquerait une étape, un lieu. Ce lieu, c’est le lieu de la communauté. Chers amis, notre communauté chrétienne et paroissiale doit aussi être ce lieu non pas seulement de l’annonce mais aussi de l’expérience de la consolation. 

Le consolation spirituelle d’une part, selon la définition que nous donne Saint Ignace dans ses exercices spirituels : « un mouvement intérieur qui est excité dans l’âme, par lequel elle commence à s’enflammer dans l’amour de son Créateur et Seigneur, et en vient à ne savoir plus aimer aucun objet créé sur la terre pour lui-même, mais uniquement dans le Créateur de toutes choses (…) J’appelle consolation toute augmentation d’espérance, de foi et de charité, et toute joie intérieure ». Et c’est une première question à se poser : comment notre communauté paroissiale aide-t-elle tous ses enfants à grandir dans cette consolation spirituelle ? Quels que soient leur sensibilité ou leur âge ?

La seconde question à se poser c’est celle de la consolation humaine. Est-ce que notre communauté paroissiale est un lieu où la fraternité réelle permet la consolation ? Est-ce que nous sommes vraiment attentifs les uns aux autres ? Les anciens attentifs aux nouveaux ou aux plus jeunes qui ne pensent pas comme eux ? Les plus récemment arrivés ou les plus jeunes, attentifs aux besoins des plus habitués ? Bien sûr que la Covid ne nous aide pas à tisser des liens entre nous. Mais je crois pourtant qu’il y a un enjeu à apprendre à se connaître, à se consoler mutuellement, à se soutenir dans le combat spirituel, à vivre l’amitié entre nous : en découvrant les personnes au-delà de la première apparence, en posant d’abord un regard d’espérance sur les autres. Voilà un bon défi pour chacun d’entre nous, faire de notre communauté paroissiale le lieu de la consolation véritable et de l’amitié fraternelle. 

Ainsi donc, frères et sœurs, puissions-nous apporter au monde la consolation que nous aurons goûté dans la confession, et grandir les uns et les autres dans la fraternité paroissiale, afin que notre paroisse soit pour chacun un lieu de consolation véritable.