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La spiritualité de la liturgie

La spiritualité de la liturgie

(texte intégral de la conférence)

Introduction

En vous parlant de la spiritualité de la liturgie, je vais simplement essayer de répondre à une seule question : « comment la liturgie nous permet de communiquer avec Dieu ? »

C’est la question fondamentale de la vie chrétienne : comment peut-on communiquer avec Dieu ? Comment peut-on savoir que ce qu’on vit et ce qu’on croit intéresse Dieu ? Comment faire cette expérience de la manière la plus objective possible ?

  • Chacun, chacune d’entre nous peut en avoir l’intuition personnelle, peut même en avoir fait une expérience sensible : avoir ressenti à différents moments ce soutien de Dieu.
  • Mais si cela nous aide, cela ne suffit pas à nourrir la foi de toute une vie.
  • Nous avons besoin de nous appuyer sur une expérience palpable, visible, la plus objective possible, renouvelable de manière régulière, partagée avec d’autres, de notre relation avec Dieu.
  • C’est grâce à cette expérience renouvelée que nous pourrons entretenir et approfondir notre foi en Dieu, Père, Fils et Saint-Esprit

 

La liturgie c’est justement cette expérience partagée et régulière de la rencontre avec Dieu : C’est ce que signifie le mot lèïtourgia liturgie : qui vient de 2 mots grecs : ergon : l’action, l’œuvre et lèïton : public.

Liturgie signifie l’action publique, l’expérience collective, que nous faisons pour rencontrer Dieu et pour percevoir les bienfaits de sa présence dans notre vie.

La liturgie chrétienne est donc une action.

La liturgie est donc une action. Cela peut sembler un peu bizarre pour un incroyant qui assisterait « de l’extérieur » à une messe où il verrait la plupart des gens rester à leur place pendant une heure.

De même, pour beaucoup d’adolescents ou d’adultes, qui voient la messe uniquement sous l’angle d’un enseignement sur la bible ou d’une obligation dominicale et qui n’ont pas compris qu’il peut vraiment se passer quelque chose entre eux et Dieu, la messe devient nécessairement ennuyeuse.

En quel sens la liturgie est une action ?

La liturgie est une action parce qu’elle est une rencontre où se vit un partage existentiel :

  • Il y a des rencontres où il ne se passe pas grand-chose parce qu’on repart comme on est venu,
  • mais lorsque vous revenez d’une rencontre avec la conviction que quelque chose d’important a été vécu, que vous avez pu approfondir quelque chose, poser un geste important, aborder enfin un sujet qui vous tracassait depuis des semaines : vous vous dites que cette rencontre était importante; qu’il s’est vraiment passé quelque chose.

Cette rencontre a peut-être été passive pour une personne qui a suivi la scène de loin mais pour vous elle a été active.

 

La liturgie est donc une action parce qu’on n’est plus tout à fait le même quand on repart.

Pour nous permettre d’« agir », la liturgie utilise des symboles

Parce qu’elle veut nous permettre de relier toute notre vie à Dieu, c’est-à-dire une réalité qui nous dépasse, la liturgie utilise comme outil des symboles :

  • position du corps : debout pour accueillir le christ qui vient, qui parle ou se rend présent dans l’eucharistie, assis pour écouter et méditer sa parole, à genoux pour reconnaître sa grandeur…),
  • eau, pain, vin, huile, feu, imposition des mains…).

Il faut prendre le mot symbole au sens étymologique : sumbolè< sumbaleïn : ce qui unit deux choses qui vont ensemble, ce qui rapproche (c’est le contraire du diable (diabolos) qui est celui qui divise).

Le symbole, c’est une parole, un objet, quelque chose qui nous permet d’exprimer une réalité indicible, mais authentiquement vécue 

  • par exemple une alliance au doigt signifie pour beaucoup de gens que l’on est marié, mais pour celui qui la porte, c’est n’est pas seulement d’abord une information : c’est un signe par lequel il exprime le lien qui le relie à son conjoint : cette alliance renvoie à une expérience longue et profonde qu’il ne pourrait simplement décrire en quelques mots.
  • De la même manière un enfant de 4 ans dont c’est l’anniversaire, vous pourriez lui faire de grands discours pour lui dire qu’il a quatre ans, c’est quand il va souffler les bougies sur son gâteau d’anniversaire, entouré de tous ses amis qu’il pourra dire : « ça y est j’ai quatre ans »…

Le symbole permet de dire ce qui n’est pas dicible mais qui est pourtant réel : pour la liturgie c’est la relation avec Dieu qui s’approfondit.

A travers ces actions de la liturgie, je m’engage tout entier :

  • c’est un moyen de m’identifier,
  • d’engager tout mon être et pas seulement mon intelligence,
  • d’entrer en communication avec Dieu sans en connaître par avance les conséquences (beaucoup de gens ont vécu des conversions pendant les messes)
  • et d’entretenir cette relation.

 

Une action vécue personnellement

Que se passe-t-il pendant la messe ? Voici, au fur et à mesure de la messe, ce que chacun est invité à vivre comme action (Je vous présente l’idéal, bien conscient que nous ne sommes pas toujours capables de vivre cela parfaitement) :

  1. Nous nous rendons à la messe pour vivre une rencontre avec le Christ.
  2. Lorsque nous nous levons au début de la messe nous l’accueillons dans notre cœur : il est présent au milieu de nous.
  3. Nous reconnaissons d’emblée qu’il nous est difficile de tenir compte de sa présence dans tous nos actions et pensées et nous lui en demandons pardon
  4. Nous proclamons sa gloire et nous reconnaissons par là les merveilles qu’il a fait dans notre vie
  5. Nous écoutons sa Parole comme une parole vivante pour aujourd’hui
  6. Nous proclamons ensemble notre foi, comme les apôtres tout heureux d’avoir reconnu présent le Christ ressuscité.
  7. Nous lui présentons nos prières pour les autres
  8. Dans la liturgie eucharistique, nous offrons au Père nos vies et nos intentions dans une action complémentaire de celle du prêtre (il est en quelque sorte le moteur et nous apportons le carburant, puisque personne d’autre que nous-mêmes ne peut offrir à Dieu ce que nous portons au plus intime de notre être).
  9. La communion permet cet échange existentiel avec le Christ : c’est à chaque fois une sorte de défi qui devrait nous habiter : « vais-je dire oui à l’accueil du Christ dans ma vie aujourd’hui et pour les jours à venir », ou bien « non, je ne suis pas prêt à cela ». C’est vraiment lui qui vient se rendre présent à nous. Il y a un véritable échange.
  10. Nous repartons avec cette présence du Christ renforcée, la conscience d’une intimité que le Christ à mis en nous, et la joie de le mettre en œuvre dans notre vie quotidienne.

A la fin de la messe, il s’est bien passé quelque chose entre nous et le Christ aujourd’hui.

Une action vécue à plusieurs

La liturgie est aussi une action vécue à plusieurs. C’est le principe même de la liturgie (action publique)

  • Le fait de savoir que nous sommes plusieurs centaines chaque jour à venir aux différentes messes nous aide à réaliser que notre foi n’est pas seulement une idée, un refuge mythologique ou intimiste, mais belle et bien une dimension très importante de notre humanité, partagée par de nombreux croyant à travers le monde.
  • Et puis, la joie ça se partage : on ne fait jamais la fête tout seul. On voit bien que nous sommes heureux d’être nombreux lorsqu’il y a un temps fort (par ex. à la vigile pascale : heureux d’avoir vécu une expérience forte à plusieurs, dont nous pouvons reparler) et déçu quand il n’y a pas grand monde à une liturgie qui était porteuse.
  • Parce qu’ils n’ont pas un sens unique et restreint, les symboles permettent à plusieurs personnes de participer à la même liturgie et d’y trouver un lien entre Dieu et leur vie particulière.
    1. Ainsi, lorsque nous récitons le symbole des apôtres, chacun de nous donnera à chaque affirmation du credo une signification un peu différente de celle de son frère : par exemple en évoquant « père tout puissant», l’un sera touché par l’expérience d’un épisode où Dieu l’a aidé à sortir d’une expérience difficile, tandis qu’un autre pensera à la puissance de la création…
    2. Chacun sera touché par différents aspects de la liturgie : un geste, une parole, une musique et chacun y portera une expérience propre.
    3. Ainsi, à la messe, chacun vient avec ce qu’il est, ce qu’il vit, l’image qu’il a de Dieu, etc. et se laisse toucher par tel ou tel aspect de la liturgie.
    4. Malgré cette diversité d’attitudes et d’expérience, chacun peut se sentir porté par la communauté qui s’unit dans l’action liturgique.
  • Dans les évangiles, il arrive que le Christ prenne à part tel disciple pour faire une réprimande, mais de manière générale, les enseignements et les signes qu’il donne sont toujours vécus en communauté. La configuration au Christ n’est pas une démarche individuelle.
  • Le chrétien reçoit sa configuration au Christ par le biais de l’Église, qui a reçu justement la mission de garder et de porter la Parole et les gestes sauveurs du Christ. C’est donc en Église que le Père, par le Fils et dans l’Esprit Saint : parle, baptise, pardonne et nourrit la vie du Chrétien.

 

La liturgie est le lieu de base de l’expérience mystique

Pour qui cherche à vivre de Dieu et en Dieu, la liturgie constitue la voie privilégiée de la communion entre l’homme qui cherche Dieu et Dieu qui cherche l’homme.

Le rythme, la musique, l’harmonie, la prière méditative, la prière contemplative, la prière de louange, la méditation de la parole, l’échange existentiel qui se vit dans la communion… tout cela nourrit la vie spirituelle à court terme et à long terme:

  • A court terme, parce que telle ou telle liturgie va nous permettre de sentir plus profondément la présence de Dieu et nous éclairer sur tel aspect de notre vie.
  • A long terme aussi parce que toutes ces rencontres laissent leurs empreintes dans notre vie spirituelle.
    1. Si on prend la peine d’aller rencontrer une personne, de manière régulière, chaque semaine de notre vie, on pourra dire à la fin de notre vie, même si on a parfois été distrait ou que certaines rencontres ont semblé ne rien apporter de neuf, que l’on connaît bien cette personne et qu’elle nous connaît bien.
    2. Ainsi en est-il dans notre rencontre avec Dieu. Notre connaissance mutuelle s’approfondit de rencontres en rencontres.

 

Conclusion

Certains demandent si on peut être « chrétien non pratiquant »…

  • oui, dans le sens où on peut garder une certaine relation avec Dieu, continuer à croire qu’il existe et être généreux avec les autres.
  • Mais si on veut approfondir cette relation avec le Christ, entrer dans une vie mystique où on accepte régulièrement de se laisser interroger par Dieu et de découvrir la grandeur de son amour pour nous, en lien avec les autres chrétiens, je ne vois pas comment on peut se passer de la pratique régulière de la messe.


Henri de La Hougue