17 Déc La croix et les noces !
Que le Seigneur reçoive de vos mains ce sacrifice à la louange et à la gloire de son nom, pour notre bien et celui de toute l’Église » dit-on maintenant à l’offertoire de la messe. S’il va nous falloir un peu de temps pour l’intégrer, cette phrase nous rappelle que la messe est l’actualisation non sanglante de l’unique sacrifice sanglant du Christ sur la croix. Dit plus simplement : la messe c’est la Croix qui s’avance dans l’histoire !
Chaque fois que la messe est célébrée, au moment précis de la consécration, 2000 ans d’histoire sont balayés. Nous voici contemporains du mystère de la croix, plongés aux cotés de Marie et de Jean devant Jésus crucifié. D’ailleurs le prêtre ne dit pas « ceci est le corps de Jésus qui s’est livré sur la croix il y a 2000 ans » mais bien « ceci est mon corps livré pour vous » (au présent).
La croix d’autel rappelle cela sans ambiguïté bien qu’à une certaine époque on ait eu envie de la faire disparaitre. C’est pourquoi il pourrait s’agir aussi bien de la Croix de la passion, signe du serviteur souffrant, au flanc transpercé d’où s’écoulent pour nous le sang et l’eau – l’eucharistie et le baptême -, comme de la Croix glorieuse qui évoquant le retour du Christ dirige notre regard vers Lui »
Quand nous avons du mal à prier pendant la longue prière eucharistique, transportons-nous par l’âme jusqu’au au pied de la croix, prenant Marie pour compagne et contemplons Jésus qui donne sa vie pour nous et avec nous. Car son sacrifice transforme l’histoire tout entière. L’anamnèse, l’acclamation qui suit la consécration et que le prêtre introduit souvent par « il est grand le mystère de la foi » nous donne ainsi le sens de toute l’action eucharistique : « nous annonçons ta mort, nous proclamons ta résurrection, nous attendons ta venue dans la gloire ».
Car la liturgie eucharistique n’est pas un spectacle extérieur auquel il faudrait assister passivement. Elle n’est pas non plus simplement un grand repas communautaire où chacun pourrait à sa guise faire tel ou tel rôle. Elle possède une dimension sacrificielle et une dimension nuptiale.
La nuptialité de la messe est marquée par les dialogues (ex : le Seigneur soit avec vous…) entre le prêtre et l’assemblée, en particulier celui de l’offertoire. Comme un époux parle à son épouse, le prêtre – occupant symboliquement la place du Christ – dialogue avec l’Église épouse du Christ. Mais également par cette phrase prononcée juste avant la communion : « heureux les invités aux repas des noces de l’Agneau ». L’Eucharistie est donc le banquet nuptial où le Christ époux nourrit son Église. C’est la dynamique de la communion.
Le sacrifice eucharistique est d’abord l’unique sacrifice du Christ sur la croix, sacrifice actualisé, rendu présent par le sacrement. Au sens chrétien, le sacrifice est le don total de soi par amour de Dieu et de nos frères. C’est l’acte suprême d’amour à travers la souffrance et jusqu’à̀ la mort. Le Christ, parce qu’il nous a aimés d’un amour parfait, est victorieux du péché et de la mort. Puisqu’il s’unit à nous, il nous libère du péché́ et de la mort qui tenaient l’humanité́ captive et loin de Dieu. Durant la messe, nous nous unissons au Christ ; nous accueillons le don de sa vie. Nous consentons à nous livrer totalement avec lui au Père et à nos frères par amour. C’est ce que nous sommes appelés à vivre dans l’offertoire. Quand le prêtre présente le pain et le vin, nous offrons avec lui nos vies et nous nous unissons de tout cœur au Christ qui donne sa vie pour nous. Le sacrifice du Christ devient le nôtre. Livrés avec lui, nous avons part à sa résurrection. De cette communion nouvelle avec Dieu naît un monde nouveau d’où̀ surgit le royaume de Dieu ; ce royaume où l’Amour est roi.
P. Raphaël Cournault