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C’est la confiance

C’est la confiance

En quinze jours, c’est la deuxième exhortation apostolique que le pape nous adresse. Cette fois-ci, c’est, à l’occasion du 150e anniversaire de la naissance de Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte-Face que le pape nous souligne la force qui se dégage de la vie de Thérèse: “C’est la confiance et rien que la confiance qui doit nous conduire à l’amour”.

Ce qui frappe en premier le pape, c’est que Thérèse ne concevait sa consécration religieuse qu’en lien avec la recherche du bien des autres. Elle ne concevait pas que Dieu puisse l’attirer vers lui sans attirer aussi les âmes qu’elle portait dans sa prière. Thérèse, bien qu’ayant fait le choix d’une vie cloîtrée, a une spiritualité profondément missionnaire.

La deuxième chose que retient le pape, c’est la “petite voie de la confiance et de l’amour”. Thérèse parle avec des mots tout simples de la vie avec Dieu. Consciente de ses imperfections, elle ne veut pas se comparer aux grands saints et cherche un moyen d’aller au ciel par une “petite voie bien droite, bien courte, une petite voie toute nouvelle”.

Elle utilise l’image de l’ascenseur qu’elle avait vu un jour pour la première fois de sa vie : “l’ascenseur qui doit m’élever au ciel, ce sont vos bras, Ô Jésus !”. Elle ne cherche pas à devenir sainte par ses propres mérites, mais souligne au contraire toujours la primauté de l’action de Dieu et de sa grâce. “Je paraîtrai devant vous les mains vides !” dit-elle au Seigneur. Elle compte sur la miséricorde infinie d’un Dieu qui aime sans limite et qui a tout donné sur la croix de Jésus-Christ. Elle fait infiniment confiance au Seigneur qui la conduit et souhaiterait que celui-ci puisse encourager tous ceux qui se sentent fragiles, limités et pécheurs: “Ah ! Si toutes les âmes faibles et imparfaites sentaient ce que sent la plus petite de toutes les âmes, l’âme de votre petite Thérèse, pas une seule ne désespèrerait d’arriver au sommet de la montagne de l’amour, puisque Jésus ne demande pas de grandes actions, mais seulement l’abandon et la reconnaissance”. 

Dans sa relation au Christ, Thérèse est décentrée d’elle-même, ce qu’elle recherche ce n’est pas d’abord son propre désir de s’unir au Christ, mais le désir profond du Christ de s’unir à nous et de demeurer dans nos cœurs.

Cela ne se manifeste pas seulement lorsqu’elle est en prière, mais dans sa manière de s’abandonner à Dieu pour toutes les actions quotidiennes. La sanctification concerne la vie intégrale, la totalité de l’existence concrète, et notamment dans les moments où nous sommes envahis par la peur, où nous ressentons, par désir de sécurité, le besoin de tout contrôler. La pleine confiance, qui devient abandon dans l’amour, nous libère des calculs obsessionnels, de l’inquiétude constante pour l’avenir et des peurs qui enlèvent la paix. Ayons confiance, son plan d’amour et de plénitude se réalisera dans notre vie.

Thérèse a pourtant été confrontée à une “obscurité de la nuit”: elle évoque sa “grande épreuve contre la foi”, où son âme, marquée par l’athéisme militant très fort qui atteint à cette époque son apogée, est “envahie des plus épaisses ténèbres” et perçoit dans ces ténèbres le désespoir et le vide du néant.

Mais en même temps, elle sent dans cette proximité l’occasion de s’unir à ces frères et sœurs incrédules et, comme Jésus mangeait avec les pécheurs, elle se met spirituellement “à table avec eux” pour les porter au Seigneur. Elle vit intensément une confiance illimitée en la miséricorde infinie de Dieu. Le fait de voir qu’Henri Pranzini, un criminel pour lequel elle avait prié juste avant son entrée au Carmel, ait embrassé trois fois le crucifix avant son exécution, a été pour elle un signe très fort: “Depuis cette grâce unique, mon désir de sauver les âmes grandit chaque jour” dit-elle.

La troisième chose que souligne le pape, c’est le grand désir de Thérèse de “correspondre à l’amour de Jésus, de lui rendre amour pour amour”. Inspirée par le cantique des Cantiques, elle parle du Christ comme son époux, du délicieux cœur à cœur qu’elle peut avoir avec Lui dans la solitude de la vie conventuelle, en attendant de le voir un jour face à face. Elle se plonge avec amour dans tous les mystères de la vie du Christ, dont elle devient contemporaine, habitant l’Évangile avec Marie et Joseph, Marie-Madeleine et les apôtres. Avec eux, elle pénètre dans les profondeurs de l’amour du cœur de Jésus.

Elle contemple l’amour du Christ dans la plus grande des simplicités, elle cherche à imiter la discrétion et l’humilité de Marie et à s’effacer pour que l’amour du Christ puisse rayonner sur les autres. Dans les tâches les plus humbles de la vie communautaire, comme l’accompagnement d’une sœur malade au caractère difficile, elle perçoit la grâce de Dieu qui se manifeste.

Elle est animée d’un immense désir, d’une passion pour l’Évangile qu’aucune vocation ne peut satisfaire à elle seule. Elle voulait avoir tous les charismes dont Saint Paul parle dans sa lettre aux Corinthiens (1 Co 12, 28), mais elle conclut dans un magnifique texte : « Considérant le corps mystique de l’Église, je ne m’étais reconnue dans aucun des membres décrits par saint Paul, ou plutôt je voulais me reconnaître en tous… La Charité me donna la clef de ma vocation. Je compris que si l’Église avait un corps, composé de différents membres, le plus nécessaire, le plus noble de tous ne lui manquait pas, je compris que l’Église avait un Cœur, et que ce Cœur était brûlant d’amour. Je compris que l’Amour seul faisait agir les membres de l’Église, que si l’Amour venait à s’éteindre, les Apôtres n’annonceraient plus l’Évangile, les Martyrs refuseraient de verser leur sang… Je compris que l’Amour renfermait toutes les Vocations, que l’Amour était tout, qu’il embrassait tous les temps et tous les lieux… en un mot, qu’il est éternel !… Alors dans l’excès de ma joie délirante, je me suis écriée : Ô Jésus, mon Amour… ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’Amour… Oui j’ai trouvé ma place dans l’Église et cette place, ô mon Dieu, c’est vous qui me l’avez donnée… dans le Cœur de l’Église, ma Mère, je serai l’Amour… ainsi je serai tout… ainsi mon rêve sera réalisé !!! ».

Se faisant, Thérèse ne se met pas au centre, mais à la dernière place : elle sera l’Amour en se faisant obéissante, comme le Christ, dans les plus petites choses : c’est la “petite voie”.

Cet appel missionnaire à faire le bien en manifestant l’amour de Dieu sur la terre, se poursuit aussi au ciel. “Je compte bien ne pas rester inactive au ciel. Mon désir est de travailler encore pour l’Église et pour les âmes”. “Ce sera comme une pluie de roses”.

Finalement, le pape souligne combien Thérèse, par son attention à se focaliser d’abord sur l’amour, la confiance et la miséricorde, rappelle à tous ceux qui ont la charge d’enseigner ou d’accompagner des croyants, combien leur enseignement ou leur témoignage sur le Christ doit d’abord être centré sur ces vérités les plus essentielles.

En un temps qui nous invite à nous enfermer dans nos intérêts particuliers, Thérèse nous montre qu’il est beau de faire de la vie un don.

À un moment où les besoins les plus superficiels prévalent, elle est témoin du radicalisme évangélique.

En un temps d’individualisme, elle nous fait découvrir la valeur de l’amour qui devient intercession.

À un moment où l’être humain est obsédé par la grandeur et par de nouvelles formes de pouvoir, elle montre le chemin de la petitesse.

En un temps où de nombreux êtres humains sont rejetés, elle nous enseigne la beauté d’être attentifs, de prendre soin de l’autre.

À un moment de complexité, elle peut nous aider à redécouvrir la simplicité, la primauté absolue de l’amour, la confiance et l’abandon, en dépassant une logique légaliste et moralisante qui remplit la vie chrétienne d’observances et de préceptes et fige la joie de l’Évangile.

En un temps de repli et d’enfermements, Thérèse nous invite à une sortie missionnaire, conquis par l’attrait de Jésus Christ et de l’Évangile”. (§52)

Alors que nous entrons dans la semaine de la Toussaint, cette exhortation n’est pas seulement l’occasion de nous laisser toucher par le message de sainte Thérèse, ou de la redécouvrir, mais aussi de demander au Seigneur la grâce de désirer devenir saint, et d’entrer résolument sur ce chemin de sainteté, qui est aussi un chemin d’abandon et de confiance.

Père Henri de La Hougue