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Prendre soin de notre âme

Prendre soin de notre âme

Dans un petit opuscule intitulé “De l’âme, Sept lettres à une amie”, l’académicien François Cheng propose une très belle réflexion sur l’âme humaine. Dans sa troisième lettre, il distingue le travail de l’âme et le travail de l’esprit.

L’esprit, dit-il, est, en nous, ce qui nous permet de penser, de raisonner, de concevoir, d’organiser, de réaliser, d’accumuler consciemment les expériences en vue d’un savoir et, par-dessus tout, de communiquer par échange. » (p. 45)

L’âme, elle, a quelque chose d’origi­nel, de natif, comportant une dimension inconsiente, insondable pour ainsi dire, qui la relie au mystère même qui, à l’origine, avait présidé à l’avènement de l’univers vivant (…) l’âme est la marque indélébile de l’unicité de chaque personne.(p. 46-47)

Une telle distinction me semble particulièrement intéressante pour comprendre ce qui est en jeu dans notre carême : il ne s’agit pas seulement d’un travail d’ascèse du corps ou d’une conversion de l’esprit qui nous aiderait intellectuellement à accorder nos actions de carême avec les principes de charité promus par notre foi chrétienne, mais il s’agit de travailler à nourrir cette réalité plus profonde qui nous habite, qui nous définit, et qui ne trouvera son bonheur qu’en correspondant à Dieu. Saint Augustin l’affirme, en d’autres termes, au début du livre des “Confessions” : “Notre cœur est sans repos tant qu’il ne repose pas en toi”.

Prendre soin de son âme, c’est essayer de se mettre à l’écoute de cette présence fondamentale et de répondre à la soif de liberté, de grandeur, d’harmonie, et d’ouverture à laquelle elle aspire.

Nos efforts de carême ne doivent donc pas en rester à des actes purement physiques (se lever plus tôt, jeûner, lire la Bible, aller plus souvent à la messe…) ni à des efforts de notre intelligence (se raisonner en vue d’améliorer le sens de nos actions), mais ils doivent pouvoir atteindre notre être le plus profond. Pour cela, il est nécessaire de convertir notre désir, de le purifier de tout ce qui est superficiel, pour que nous puissions désirer ardemment que notre âme soit unie à celle du Christ et que nous puissions l’accueillir de plus en plus naturellement en nous.

Si ce travail de l’âme est négligé voire oublié, nous risquons d’entrer progressivement dans un mode de vie sans profondeur, même si celle-ci peut paraître brillante aux yeux de certains. Car, de la même manière qu’un corps a besoin de nourriture, de repos et d’exercice, l’âme a elle aussi besoin qu’on la nourrisse, qu’on la repose auprès de Dieu et qu’on l’exerce à grandir dans la foi, l’espérance et la charité.

Le travail de l’âme est un travail d’endurance. L’âme ne passe pas rapidement d’un état à un autre, comme peut le faire l’esprit humain. Prendre soin de son âme demande donc de la persévérance. Dans la pédagogie SUF, les chefs ou cheftaines qui ont “charge d’âme” savent bien que ce travail de l’âme ne se fait pas en un week-end, ni en un camp d’été, mais se poursuit sur plusieurs années et rendent les aînés aptes à pouvoir ensuite s’engager dans la durée, bien au-delà de leur service scout.

En ce temps du carême, prenons particulièrement soin de nos âmes…

Père Henri de La Hougue

Louis Janmot, Le Poème de l’âme. L’idéal ,vers 1850 – 1854 Lyon, musée des Beaux-Arts